Car Pouète, Cher Poète,

voici un premier pas aujourd’hui, à nouveau, incertain, vers l’inconnu de ma Vie. Je sais à présent, grâce à l’écriture, que le Temps n’existe pas. L’être en est chaque jalonnement, du plus bas, du plus lointain, jusqu’au plus haut, au plus incertain. 

Qu’at sèy adare ; n’exìsti pas bertadèramén. Que saunéji d’ùo Lénco liberàblẹ dou téms qui s’embrume ; d’ùo Lénco dibîno, prèsquẹ imperceptìblẹ, hèyto de hum ; d’ùo Lénco mîo, que seré bajudo chéns frountièros…

Je rêve d’une Parole moins soumise à l’Esprit et aux prismes des réalités. Je rêve d’une marche cadencée découvrant le mutisme de cette douleur lancinante qui vit et gît, tour à tour, en moi. 

De nèu e de bén, lou téms qui passe s’ou Terrò ; en douttance lous camîs ; e de soulitude las mountagnos dou Pouètẹ.

Je suis dans le désert des mots. Une infinie solitude, une neige épaisse et froide, recouvre depuis plusieurs années mon chemin. J’ai conscience de n’être d’aucune individualité. Mon effondrement intérieur est lui-même la reproduction d’un drame éternel qui suit le décours des siècles. 

E ataou… dans la Conscience des Déchirures et de la Véracité de l’Écriture ; j’ose encore espérer que le Temps sera d’une persévérance souveraine. Et je marche, d’un pas lent, vers cette rive jamais atteinte en moi. 

Mes pensées décharnées m’entraînent sans cesse vers un fourvoiement, un abîme de solitudes déconstruit et aussitôt reconstruit. Les mots sont trop forts ou trop suaves. L’Autre m’enseigne bien plus que ce que je ne saurai jamais m’apprendre.

Coum pouderèy escrìwẹ ? Cado lètro que-bs embìi que-s desfile héns lou frét de las mîas mâ. Que bouleri rencountrà lou boùstẹ silencî, aquéth silencî biélh de mil ans…

Chaque lettre que je vous écris se défile sous mes doigts : je n’atteins à rien. S’il fût seulement possible d’élancer ce silence, vieux de dix ans, vers le grand jour ! 

Més toutû cette injonction intime, ce que je veux dire, demeure dans la boue des souvenirs. Je ne relève rien de la Terre, elle demeure mon miroir, une flaque d’eau où je puise la force de vivre en pleurant entre ses mains.

Apprendre à retrouver pour ne plus perdre ? Si seulement vous glissiez en mon âme, un mot de Vous, Cher Poète, pour celles et ceux qui savent que l’on atteint jamais mais que tout, tout est (encore et toujours) à recommencer…

Lou Petìt Ausèth

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